Qu'est-ce que le statut de chat libre ?
Depuis 1999, la loi prévoit que les chats errants, plutôt que d'être conduits en fourrière où ils finissent souvent euthanasiés, puissent acquérir le statut de « chat libre » par la stérilisation et l'identification au nom d'une commune ou d'une association.La stérilisation est un moyen plus humain de limiter la prolifération. Le statut donne le droit à ces chats peu sociables de vivre librement ; cette solution doit idéalement s'accompagner d'un nourrissage, d'un suivi sanitaire et de l'installation d'abris.
Les animaux errants et la responsabilité du maire
Selon le Code rural et de la pêche maritime, la divagation des animaux domestiques, dont les chiens et chats, est interdite. Les maires, en tant qu'ils sont responsables de la police municipale et de la police rurale, doivent prendre toutes dispositions pour lutter contre la divagation des chiens et chats sur le territoire de leur commune.En principe, les animaux divagants, chiens ou chats, doivent être portés à la fourrière. Au-delà de 8 jours, l'animal peut être cédé à un refuge, une association de protection animale, ou une fondation, qui pourra le proposer à l'adoption. Quand ce n'est pas possible, il peut être gardé dans la mesure des possibilités du site, et souvent finalement euthanasié.Jusqu'en 1999, l'euthanasie était même la principale méthode de lutte contre la divagation et la prolifération des chats errants. Méthode qui n'était pas appliquée systématiquement et partout, toutes les communes ne se préoccupant pas particulièrement de la question des chats. Les communes urbaines intervenaient dans les quartiers d'où provenaient des plaintes, et délaissaient les autres. Quant aux communes rurales, il semble que beaucoup d'entre elles aient fermé les yeux, voire encouragé des méthodes illégales, comme le piégeage, le tir au fusil, ou l'empoisonnement.Mais n'oublions pas le travail précurseur d'associations de protection animale qui, sans attendre l'évolution de la législation, ont su proposer des méthodes alternatives dès la fin des années 1970.Le statut de chat libre
En 1999, une grande nouveauté est apparue : la création du statut de « chat libre » dans le cadre de la Loi n°99-5 instaurant l'article L211-27 du Code rural. Les chats non identifiés vivant dans des lieux publics peuvent être stérilisés et identifiés, ce qui leur permet d'acquérir le statut de chat libre et le droit de vivre librement dans les lieux publics.Selon cet article L211-27, le maire peut, par arrêté, faire procéder à de telles campagnes de stérilisation et identification, à son initiative, ou à la demande d'une association de protection animale.Cependant, jusqu'en 2015, les communes étaient libres de mettre en place de telles campagnes de stérilisation et identification, ou de continuer à appliquer les méthodes traditionnelles (fourrière et souvent euthanasie).Depuis le 1 er janvier 2015, en application de l'Arrêté du 3 avril 2014, les chats errants vivant dans les lieux publics ne peuvent plus être conduits en fourrière, à moins qu'une campagne de stérilisation et identification ne puisse être mise en œuvre. Cependant, les motifs pouvant permettre à une commune de justifier une telle impossibilité ne sont pas nommés.Lorsqu'il y a partenariat entre une mairie et une association de protection animale, « la gestion, le suivi sanitaire et les conditions de garde de ces populations sont sous la responsabilité du représentant de la commune et de l'association de protection des animaux. » (Article 211-27 du Code rural)Sur le terrain des chats libres
Concrètement, dans le cadre d'un bon partenariat, l' association s'occupe en général du travail de terrain : capture, transport chez le vétérinaire, soins post-opératoires, relâcher, puis nourrissage régulier, idéalement accompagné de l'installation d' abris et d'un suivi sanitaire. Les chats sociables et les chatons sont proposés à l'adoption. La commune assure les volets administratifs (Arrêté municipal) et financiers, au moins en partie (prise en charge du coût de la stérilisation et de l'identification par exemple).Malheureusement, en réalité, beaucoup d'associations de protection animale interviennent sur le territoire de communes sans bénéficier de l'aide de celles-ci. En effet de nombreuses municipalités tendent à fermer les yeux sur la situation des chats errants, un problème secondaire à leurs yeux. De plus, les budgets des communes se sont souvent resserrés ces dernières années. Des associations de protection animale réalisent donc à leurs frais des campagnes de stérilisation et identification de chats errants qui devraient être assumées par les mairies.Pourquoi ne pas proposer ces chats à l'adoption ?
Les chats errants sont très nombreux, ils sont des millions en France, et beaucoup, ayant grandi sans contact direct avec les humains, ne sont pas suffisamment sociables. Trop « sauvages » pour être proposés à l'adoption.Cependant, certains sont plus sociables, soit qu'il s'agisse de chats ayant grandi en maison puis abandonnés, soit que, tout errants qu'ils soient, ils aient été accoutumés jeunes au contact humain. Ces chats sociables peuvent être proposés à l' adoption. C'est aussi le cas des chatons capturés en même temps que leur mère errante : une fois sevrés, ils sont adoptables.Lorsque leur cadre de vie est favorable (sécurité...) et qu'ils bénéficient d'abris, d'un nourrissage et d'un suivi sanitaire, les chats errants nés dehors peuvent mener une vie satisfaisante (les chats abandonnés ayant grandi à l'intérieur peuvent éprouver davantage de difficultés). Ils sont libres d'explorer leur territoire, de chasser les petits rongeurs, et de sociabiliser prudemment avec les humains qui les nourrissent. Du point de vue humain, une colonie de chats libres bien intégrée peut devenir, à travers les activités de nourrissage, de soins, de bricolage, créatrice de lien social pour un quartier.Pourquoi ne pas simplement les laisser se reproduire ?
Il existe une vision romantique qui consiste à voir dans les chats errants des villes, des « chats de gouttière » débrouillards et bohèmes, et dans les chats errants des campagnes, des animaux goûtant les joies de la vie sauvage. Si l'on s'en tenait à cette vision, la solution la plus respectueuse serait de ne pas intervenir : « Laisser les faire leur vie ! », entend-on parfois.Dans les faits, les chats errants se débrouillent souvent moins bien que certains voudraient le croire. Disette, maladies, blessures, sont le lot d'une grande partie d'entre eux, comme le constatent les associations de protection animale qui sont à leur contact sur le terrain.Un animal domestique est un animal dont le patrimoine génétique a évolué au fil de millénaires de sélection et d'interaction avec les humains. Il a également parfois été déplacé dans un environnement très différent de son milieu d'origine. Ces animaux peuvent avoir retiré certains bénéfices de la domestication (nourriture, confort, protection...), mais aussi développé certaines vulnérabilités physiques et psychiques.Les chats ayant été domestiqués au Proche-Orient au cours du néolithique, les ancêtres des chats domestiques européens ont plus de parenté avec les chats sauvages de régions steppiques chaudes, qu'avec les chats sauvages forestiers d'Europe. Ils ne sont pas aussi parfaitement équipés que leurs cousins locaux pour passer l'hiver.Chez les chiens, dont les ancêtres loups vivaient en meute, les humains ont préféré les individus témoignant de la plus grande docilité et du plus fort attachement. Ces caractéristiques en font des animaux fidèles et touchants mais aussi vulnérables face aux abus de leurs maîtres.Chez les moutons, les humains ont sélectionné les individus dont la laine était la plus fournie, mais aussi les plus grégaires, plus faciles à garder. Cette caractéristique en fait des animaux vulnérables vis-à-vis des prédateurs, car à la différence de nombreux ongulés sauvages, ils ne se dispersent pas lorsqu'ils sont attaqués.Chez les cochons, ce sont entre autres qualités, la vitesse de croissance et la capacité reproductrice des truies qui ont été favorisées. Par accouplement, tantôt accidentel, tantôt volontaire, avec des sangliers sauvages, on a obtenu des cochongliers, dont la prolifération a pu être problématique sur certains sites.L' écologie des espèces domestiquées est également différente de celle de leurs ancêtres sauvages. L'impact écologique des populations de chats domestiques errants est peu comparable à celui des populations de chats sauvages forestiers. Les densités de population, l'utilisation de l'espace, la capacité reproductrice, différent entre cousins domestiques et sauvages. Selon une étude parue en 2013 dans la revue Natu re, les chats domestiques causeraient annuellement aux États-Unis la mort d'une quantité d'oiseaux comprise entre 1,3 et 4 milliards.Les êtres humains, en tant qu'acteurs de la domestication, conservent une responsabilité tant vis-à-vis du bien-être des animaux domestiqués que de leur impact écologique.Enfin, de nombreux humains considèrent la prolifération des chats errants comme une source de nuisances : hurlements, bagarres, odeurs d'urine, maladies... La gravité de ces nuisances peut être diversement évaluée d'une personne et d'une culture à l'autre. Quoi qu'il en soit, les tentations de lutter contre la prolifération au moyen de méthodes violentes étant toujours présentes, les acteurs de la protection animale se doivent de proposer des alternatives.La stérilisation et l' identification des chats errants permet de les protéger en leur conférant un statut reconnu par la loi, tout en luttant contre leur prolifération, et du même coup contre les souffrances qu'ils subissent autant que contre les nuisances qu'ils causent.Les textes
Article L211-19 du CRPM (Code rural et de la pêche maritime) : « Il est interdit de laisser divaguer les animaux domestiques et les animaux sauvages apprivoisés ou tenus en captivité. »Article L211-22 du CRPM : « Les maires prennent toutes dispositions propres à empêcher la divagation des chiens et des chats. Ils peuvent ordonner que ces animaux soient tenus en laisse et que les chiens soient muselés. Ils prescrivent que les chiens et les chats errants et tous ceux qui seraient saisis sur le territoire de la commune sont conduits à la fourrière, où ils sont gardés pendant les délais fixés aux articles L211-25 et L211-26. »Article L211-23 du CRPM : « Est considéré comme en état de divagation tout chat non identifié trouvé à plus de deux cents mètres des habitations ou tout chat trouvé à plus de mille mètres du domicile de son maître et qui n'est pas sous la surveillance immédiate de celui-ci, ainsi que tout chat dont le propriétaire n'est pas connu et qui est saisi sur la voie publique ou sur la propriété d'autrui. »Article L211-27 du CRPM :« Le maire peut, par arrêté, à son initiative ou à la demande d'une association de protection des animaux, faire procéder à la capture de chats non identifiés, sans propriétaire ou sans détenteur, vivant en groupe dans des lieux publics de la commune, afin de faire procéder à leur stérilisation et à leur identification conformément à l'article L. 212-10, préalablement à leur relâcher dans ces mêmes lieux. Cette identification doit être réalisée au nom de la commune ou de ladite association. La gestion, le suivi sanitaire et les conditions de la garde au sens de l'article L. 211-11 de ces populations sont placés sous la responsabilité du représentant de la commune et de l'association de protection des animaux mentionnée à l'alinéa précédent. »Arrêté du 3 avril 2014, Annexes, Chapitre V, Dispositions spécifiques au fourrières :« Les chats non identifiés, sans propriétaire ou sans détenteur, vivant en groupe, dans des lieux publics, sur le territoire d'une commune, ne peuvent être capturés qu'à la demande du maire de cette commune. Ces animaux ne peuvent être conduits en fourrière que, dans la mesure où le programme d'identification et de stérilisation prévu à l'article L211-27 du code rural et de la pêche maritime ne peut être mis en œuvre. »Nous remercions l'association L'échappée belle (77) pour la photo de couverture et la photo du site de chats libres. Cette association a bénéficié d'un don de nourriture dans le cadre de l'action LoveFood au printemps 2018. Avec AdoptMe et RespectMe, LoveFood est l'une des trois actions de notre projet A Companion Animal is For Life, un projet qui vise à en finir avec l'abandon, les problèmes liés aux chats et chiens errants, et à transformer les refuges en lieux d'asile provisoires. Pour en savoir plus, cliquez-ici.